Aucun futur hébergeur ne s’est dédit

Publié par Réseau Diois Accueil le

Cet article a été publié dans le journal Réforme le 26 novembre 2015

Propos recueillis par N. Leenhardt

Jean Fontanieu, secrétaire général de la Fédération de l’Entraide protestante, qui centralise les propositions d’hébergement de réfugiés, analyse les conséquences des attentats.

 Depuis les attentats, nous avons reçu un certain-nombre d’appels d’hébergeurs en attente d’hébergés, Nos interlocuteurs s’interrogeaient: « Est-ce que la filière est sûre ? » ; « Est-ce que les réfugiés sont bien contrôlés ? » Derrière cette peur latente, il y a, bien sûr, l’affaire du passeport syrien retrouvé sur un des kamikazes du Stade de France, passeport d’un soldat mort il y a quelques mois. Et nous avons appris depuis qu’un autre terroriste était entré par la Grèce avec lui. Ainsi, en s’infiltrant parmi les réfugiés, Daesh réussit à faire peur, en cherchant à transformer l’empathie en rejet …

Nous expliquons à nos interlocuteurs qu’il y a un filtre important des services de l’État pour les familles en attente, à la fois des services consulaires à l’étranger et des préfectures en France. Ces réfugiés, pour lesquels nous cherchons des solutions, n’arrivent pas chez nous par des « filières libres’; sans contrôle. D’ailleurs, après ces éclaircissements, aucun des celles et ceux qui se sont portés volontaires, sur notre plateforme, pour recevoir des familles de réfugiés ne s’est dédit.

 Plus inquiétant est, paradoxalement, le fait que nous avons 300 places d’accueil disponibles et que les réfugiés n’arrivent pas. C’est toute l’ambiguïté du discours politique. D’un côté, les grandes déclarations, les chiffres de 30 000 réfugiés sur deux ans, pris en partie sur les quotas de l’Allemagne et dans les « hot spots » en Italie et en Grèce. De l’autre, le manque de moyens humains dans les consulats au Liban, en Turquie, en Irak … Rappelons juste quelques chiffres qu’il faut garder en tête. Entre 200 000 et 250 000 étrangers entrent chaque année en France : des Américains en poste, des étudiants, des personnes qui viennent au titre du regroupement fami¬lial ou de l’immigration choisie. Sur ce total, seuls 20 000 réfugiés environ ont reçu une réponse positive, sur 67 000 demandes d’asile.

 Le risque de régression

Nous assistions déjà à un raidissement très net des capacités de notre pays à être une terre de refuge. Le mot immigration tétanise à lui seul toute notre classe politique. Les attentats, la fermeture des frontières conduisent aujourd’hui à une véritable régression. Nous risquons de faire machine arrière. Nous étions dans une fragile dynamique, il va nous falloir repartir à zéro/faire à nouveau de la pédagogie pour que les étrangers ne soient pas vus comme des dangers mais des hommes, des femmes, des enfants, sources de tant d’apports positifs pour notre pays.

 

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